PORTRAITS DE VILLES / Essaouira

ESSAOUIRA
Ce nom comme un fruit dans la bouche où hésite un parfum de jasmin et d’arsenic océan. Il me fallait ne pas monter sur les remparts, ni déambuler les yeux tournés vers le large. Plus loin la haute tour carrée et quatre échauguettes, le porche de pierres où passent les mille barques de pécheurs, ne pas s’y rendre. Y laisser sans témoin la criaillerie des mouettes acharnées à déchirer le ciel. Vers la plage non plus, dans le pas inévitable des touristes, ne pas aller. Mais demeurer en deçà des fortifications dans la lenteur discrète pleine d’ombres
et de fraîcheurs, de la ville protégée, emmitouflée dans ses ruelles comme un frisson sous un tissus de laine.
Occupée infiniment d’un thé à la menthe dans un verre entiédi et poisseux de sucre fondu, ma mémoire, comme une vieille cité de pirates usée par la course à la voile après les horizons, se repose auprès de petits orangers.
Sur la place publique, les ombres où bascule le soleil, apportent la nuit parfumée.



Jean-Claude Feuillarade - octobre 2017