BLESSURES

J'ai cherché un personnage dont j'aurais voulu qu'il prît le temps de regarder ces photographies.
Je l'aurais voulu sensible aux silences de ces paysages, dont il sait que l'agencement réel est bouleversé chaque minute, au contraire de la photographie qu'il contemple.
J'aurais souhaité qu'il appréciât le moment que j'ai passé dans cette nature, pendant que les plantes continuaient de croître et les flots de s'écouler.
J'ai même envisager qu'il ressente le déclic de l'appareil photographique à l'identique d'une détonation ou d'un cri, qu'il s'imagine que le paysage, alors se séparait en deux à cause de la prise de vue, entre la continuité de ce qui vit et la photographie qui fige.
Mais toi que diras-tu de ces paysages où ton absence me bouleverse?
Verras-tu ce qui a écartelé mon passé de mon futur comme une plaie?

1
Le poisson.
C'est un poisson desséché sur un amoncellement de sable. L'arête centrale a percé la chair absente et jusqu'à la peau et les écailles disparues.
Devines-tu le travail d'abrasion inévitable de chaque brise, et aussi le souffle infiniment et inutilement humide de l'océan tout proche?

© Jean-Claude Feuillarade